1 - Les affinités
entre personnes:
L'attachement d'une personne à un groupe peut
tenir pour une large part à des sympathies
envers tels ou tels membres avec lesquels cette personne
a établi, ou cherche à établir,
des relations amicales.
2 - La satisfaction de certains
besoins personnels:
Outre un certain nombre de besoins matériels,
on retiendra notamment ceux de domination ou de dépendance.
Egalement, les pulsions agressives, le désir
de prestige ou plus simplement le désir d'être
reconnu, accepté. Enfin certaines formes d'exhibitionnisme
affectif, à différents degrés.
Il est important de préciser que ces deux
types de facteurs constituent à la fois un
renfort et une menace pour la cohésion. Un
groupe qui ne leur accorderait aucune place aurait
peu de chance de subsister. En revanche, les groupes
où les liens d'intimité privés
prennent le pas sur les liens collectifs, voient leur
unité compromise; il en va de même lorsque
les membres font essentielllement du groupe le moyen
d'assouvir leurs tendances ou leurs intérêts
personnels.
3 - L'attrait d'un but commun:
Vécu comme un projet parfois exhaltant dans
les groupes spontanés en voie de formation,
il est perçu souvent de façon plus ritualiste
et plus prosaîque dans les groupes institutionnels
où il peut même s'estomper, non sans
risque pour la cohésion.
Sa force attractive dépend non seulement de
sa netteté, mais encore de son adéquation
au niveau moyen d'aspiration des membres du groupe.
Proche de ce sentiment, il faut également citer
l'attrait de l'action collective et l'attrait de l'appartenance
au groupe.
4 - Echapper à l'anxiété
et à la solitude.
"Par-delà ces affects, le mobile fondamental
est celui de communiquer, de s'unir de quelque façon
à autrui en échappant à l'anxiété
de la solitude. L'approche clinique de la vie affective
des groupes, comme de celle des individus, nous incline
à cette interprétation (4)".
La cohésion se manifeste par un ensemble de
conduites collectives. Trois d'entre elles peuvent
être expérimentalement vérifiées
dans les groupes.
1 - Le conformisme:
Tant
que nous nous conformons à ses modèles,
le groupe nous approuve et nous protège; dès
que nous sommes tentés de passer outre, nous
nous exposons à la réprobation, sinon
aux sanctions de nos compagnons - qui viennent renforcer
notre propre répugnance à nous désolidariser
du groupe.
Avec la formation d'un groupe, une certaine uniformité
dans les conduites, les opinions, les sentiments et
le langage apparaît. Dans les groupes institutionnels
ces modèles prennent la forme de coutumes auxquelles
les nouveaux venus doivent se soumettre plus ou moins
spontanément pour s'intégrer au groupe.
Mais il s'agit davantage d'une imprégnation
que d'une contrainte.
2 - La résistance
aux conduites déviantes:
Le déviant peut se définir comme membre
d'un groupe déterminé qui, seul ou en
compagnie d'une minorité, choisit plus ou moins
délibérément de transgresser
ou de transformer les normes de ce groupe en provoquant,
contre lui, les réactions plus ou moins violentes
de la majorité conformiste.
La résistance aux déviants constitue
ainsi le corollaire du conformisme.
Lorsque le déviant reste seul il est inefficace
et finalement neutralisé, expulsé ou
liquidé. Les mythes, l'histoire et l'expérimentation
s'accordent sur ce point. Il doit intervenir à
un moment et à un lieu où il soit susceptible
d'entrainer au moins un courant minoritaire avec lui.
Son influence dépend donc très largement
de la situation.
Autrement dit, le déviant positif n'est pas
seulement un précurseur imaginatif, mais un
sujet plus sensible que les autres à certaines
urgences latentes de changement. En ce sens, il se
définit davantage par son rôle social
que par son type de personnalité.
Le moment décisif est celui où le déviant
devient leader, où le réprouvé
devient réformateur. Mais le phénomène
se poursuit: l'innovateur ne peut réussir sans
un mouvement de partisans qui adhèrent assez
fanatiquement à ses projets, lesquels se répandent
alors en se normalisant et engendrent ainsi un nouveau
conformisme.
3 - L'agressivité
potentielle vers l'extérieur:
Non
seulement la cohésion se trouve renforcée
au sein du groupe lorsque celui ci se sent menacé
par l'extérieur ("l'union sacrée"),
mais même en dehors de toute menace le groupe
peut tendre spontanément à exprimer
sa solidarité en s'attaquant à ses voisins
ou en recherchant des situations de compétition.
Il existe "une sorte de corrélation entre le
renforcement de la cohésion intragroupe et
la virtualité de tensions inter-groupes (4)".
Muzafer SHERIF, un des pères de la dynamique
des groupes, expérimenta au cours des
années 40 trois méthodes pour tenter
d'atténuer ces rivalités (4):
* D'abord provoquer la réunion des efforts
de tous contre un tiers groupe pris comme adversaire
commun; cette mesure peut avoir une efficacité
provisoire mais ne fait, de toutes manière
qu'élargir le problème des tensions
intergroupes.
* Une seconde méthode consiste à
provoquer des contacts entre les deux groupes dans
des situations agréables par elles-même
(séances récréatives, goûters
communs etc...); elle se révèle fort
décevante car les membres des deux groupes
s'installent séparément dans les locaux
communs et les seuls échanges ont lieu sur
le mode agressif.
* Pour atténuer
l'agressivité entre plusieurs groupes, la seule
situation qui peut jouer un rôle décisif
consiste à susciter une interaction entre eux
à l'occasion d'une entreprise urgente dépassant
les ressources des groupes pris isolément.
On assiste alors à une évolution des
attitudes et au rétablissement progressif d'un
état de communication et de coopération
entre les groupes.
Les expériences de SHERIF ont été
reprises dans des pays et des contextes sociaux divers
avec des résultats analogues.
(1) "KURT LEWIN, LA DYNAMIQUE DES GROUPES",
"SCIENCES HUMAINES" n°14, février
1992 pages 10 et 11. Article de Michel LOBROT,
professeur à l'université de
PARIS VIII.
(2) "PSYCHOLOGIE SOCIALE, TEXTES FONDAMENTAUX
ANGLAIS ET AMERICAINS", Editions DUNOD, d'André
LEVY, professeur à la faculté
des lettres, des sciences de l'homme et des
Sociétés, à l'Université
PARIS Nord, VILLETANEUSE.
(3) "LE GROUPE ET L'INCONSCIENT", Editions
DUNOD, Collection Psychisme, Didier ANZIEU.
(4) "LA DYNAMIQUE DES GROUPES", PUF, Que Sais
Je?, de Jean MAISONNEUVE, Professeur à
l'Université de PARIS X, NANTERRE.
(5) "LES GRANDS AUTEURS EN ORGANISATION",
EDITIONS DUNOD, Collection Economie Module,
de Jean Claude SCHEID, professeur agrégé
de Sciences de Gestion à l'Université
de LIMOGE
(6) "PSYCHOLOGIE DES MINORITES ACTIVES", Presses
Universitaires de France 1979